Mes chers collègues,
Notre Président, a raison d’envisager l’avenir avec grande prudence et avec une réelle vigilance; nous ne sortirons pas de la crise en 2013 ni même en 2014, car nous rentrons certainement dans une nouvelle période où nous aurons à faire des efforts pour longtemps et où la mutualisation des moyens collectifs risquent de nous contraindre à une baisse significative de notre autonomie.
Dans l’immédiat, le produit intérieur brut de notre pays se situera, à la suite de plusieurs révisions à la baisse, à 0,8%, à peine. L’inflation nous est annoncée à hauteur de 1,5% ; les prévisions d’investissement productif seraient négatives dans un contexte de fortes incertitudes sur les perspectives d’activité et de conditions d’accès au crédit.
Le déficit de la France devrait atteindre 3% du PIB et la dette publique va continuer à s’accroitre pour atteindre 90% du même PIB.
Alors, à un moment où chacun essaye de trouver des solutions innovantes pour sauver la France, et même au cours de discussions de comptoir de bistrot, où certains évoquent la suppression des mille-feuilles administratifs, on entendait parler bien entendu de la suppression du Département. Heureusement, ces propositions chocs n’ont pas eu de suite, nos Départements sont toujours là, et l’on ne songe plus à remettre en cause l’existence de notre institution vieille de plus de deux cents ans à laquelle les Français sont attachés. Mais il n’en demeure pas moins la question non moins cruciale de la clarification des compétences, qui devra faire l’objet d’un vaste travail d’inventaire, avant transfert d’un échelon à l’autre. Car le problème de la superposition des compétences entre les divers échelons reste entier.
En ces périodes difficiles, Il nous appartiendra alors de prioriser nos actions, et n’hésitons pas à le dire, à nous désengager des domaines de compétences qui ne sont pas les nôtres. Le contexte financier auquel nous sommes confrontés, n’est pas étranger à cette inflexion que nous aurons à prendre.
Depuis une poignée d’années, le conseil général des Yvelines est en proie à un effet de ciseaux redoutable entre des dépenses sociales qui ne cessent d’augmenter d’un coté et de l’autre des ressources qui ne cessent de diminuer
Au titre d’une péréquation horizontale, qui nous est imposée, nous nous attendons à une baisse de la DGF à hauteur de 2,3 M€.
Au titre de la péréquation sur la CVAE, qui nous est imposée, nous nous attendons à un nouveau prélèvement de 2,5 M€.
Au titre des droits de mutation, nous nous attendons à une baisse de 8 % par rapport au réalisé de 2012, c’est dire si nos marges de précaution sont nulles, alors que les mouvements sont en net retrait depuis quelques mois, selon la chambre des notaires des Yvelines.
Et aussi, bien sur, à une péréquation correspondante.
J’attire votre attention aussi sur notre dépendance vis-à-vis de cette recette volatile. Elle constitue 28 % du total de nos recettes. A titre d’exemple, seul Paris a un pourçentage plus élevé (29 %), mais il n’est que de 20% dans les Hauts de Seine, de 12 % dans le val de Marne, et même 8% en Seine Saint Denis.
Nous sommes donc fortement dépendant d’une recette que nous ne maitrisons pas, et pour laquelle, l’Etat nous impose une péréquation horizontale celle-là, sous prétexte que nous percevons plus que la moyenne, alors qu’elle constitue, de fait, l’essentiel de nos ressources ,et même plus que la totalité de notre fiscalité directe .
Du coté des dépenses, d’année en année, le poids des prestations sociales, allocation personnalisée d’autonomie, RMI, prestation de compensation du handicap, mais aussi allocation de parents isolé dans le cadre de la mise en œuvre du RSA, pèse de plus en plus lourdement sur les départements ;
Au total, en France, ces dépenses ont représenté 35 Milliards en 2011, contre 14 Milliards en 2001, soit une augmentation moyenne annuelle d’environ 20%. Pour notre Département, et pour 2013, nous prévoyons une dépense supplémentaire de près de 11 Millions d’€.
Pour faire face aux besoins, certains Départements n’ont eu d’autres choix que d’aller quémander l’aide de l’Etat. Dernièrement, au cours de l’assemblée des Départements de France, le gouvernement a assure que des « mesures d’urgences seraient prises ». Mais il est clair que ni ces mesures, ni les séances de câlinothérapie de notre nouvelle ministre de la réforme de l’Etat (Marylise Lebranchu) ne seront suffisantes pour faire face au défi de la baisse de nos recettes et du vieillissement de la population auquel nous sommes confrontés.
Face à cette urgence, nous sommes demandeurs d’une vaste réforme de la fiscalité. Ainsi, comme je vous le proposais déjà l’an dernier, un premier sujet demeure l’hypothèse, de plus en répandu, de récupération sur les successions d’une partie des sommes versées au titre de la solidarité, sous réserve de la conservation d’un plancher dont le montant reste à définir.
La légitime solidarité envers les plus faibles ne doit pas avoir pour conséquence de valoriser les successions à venir au profit d’héritiers dont les critères sociaux ne sont pas forcément les mêmes.
Ce projet ne sera pas actif en 2013, mais il constitue une piste législative qu’il nous faudra suivre durant l’année prochaine, au cours de laquelle le grand débat sur la dépendance ne pourra être absent.
La deuxième idée, parmi d’autres, est de nous confier une part de la CSG afin de faire face à la décroissance des dotations et à son remplacement par une recette liée à la richesse du territoire.
Un troisième point s’invitera un jour ; C’est celui, une fois de plus, du grand chantier de la revalorisation de nos bases locatives, socle de l’imposition locale afin de réparer les injustices dues à une méthode d’estimation aujourd’hui dépassée et incompréhensible.
Un dernier point que je voudrais souligner, c’est celui de notre dette qui se situera, fin 2012, encore, à un faible niveau. Notre dette comptable sera aux environs de 155 M€, niveau particulière faible si on le compare aux autres départements. Mais il ne vous aura pas échappé que notre autofinancement brut, se réduit de manière importante en passant de 204 M € en 2011 à 144 € en 2012 et à 100M € pour 2013. Si l’on estime nos amortissements obligatoires aux environs de 90 M€, vous voyez comment la part de notre autofinancement net se réduit considérablement.
En conséquence, c’est grâce à l’emprunt que nous maintiendrons l’investissement à ce très haut niveau d’environ 360 M€ par an.
A titre de comparaison, il est d’environ 150 dans la Val d’Oise et de 240 dans l’Essonne.
Le cout de la dette va commencer à prendre part dans notre budget d’investissement, comme dans celui de fonctionnement. Alors, certes, le coût actuel du crédit est faible, mais les marges bancaires sont fortes, en raison de la faiblesse des disponibilités. La récente dégradation de la notation de la dette souveraine de la France peut aussi avoir des conséquences sur le coût de ce crédit.
Dans les Yvelines, et pour les finances de notre Département, n’attendons pas de salut de la redistribution, mais du développement économique et des atouts de notre Département. En ces périodes contraintes, il est d’autant plus important de faire progresser nos investissements productifs. Et je salue donc Monsieur le Président, votre souhait de marquer l’année 2013 par la conduite de chantiers d’envergure exceptionnelle et utiles pour notre avenir; D’une part, la poursuite de projets structurants comme le tramway, la nouvelle voie sur Sartrouville-Montesson, et d’autre part des projets nouveaux sur l’axe Seine ou le plateau de Satory au devenir économique. Je ne saurais aussi oublier la poursuite du plan d’aménagement numérique. Tous ces projets sont susceptibles de capter à leur tour des projets d’entreprises porteurs d’emplois nouveaux (et de recettes fiscales supplémentaires !).
Dans ce contexte inquiétant, j’approuve, Monsieur le Président, votre souhait de réagir fermement par une maîtrise de la dépense publique, en fixant comme objectif une limite de 2 % à nos dépenses de fonctionnement, contre 2,5 % l’an dernier, ce qui sous-entend qu’il nous faudra trouver des marges d’économies relative aux crédits courant afin de dégager des marges de manœuvre pour financer la croissance des dépenses obligatoires, qui connaitront une dynamique forte.
Ces économies seront nécessaires pour accroitre aussi les moyens des secteurs prioritaires.
Il nous faudra redoubler de vigilance. La progression de la masse salariale devra être limitée, et la priorité sera donnée aux redéploiements en internes afin de répondre aux besoins de l’action départementale.
L’efficience de nos services sera poursuivie et l’évaluation de nos actions, leur performance doit permettre d’accroitre notre efficacité. Il nous faudra tout simplement adapter la demande à la plus stricte nécessité.
Nous devrons rester attentifs à l’évolution de notre niveau de dépenses parce que nous pensons aussi que l’argent public doit avoir ses limites, que la fiscalité a elle aussi ces limites et que les mots de compétitivité et de baisse des charges ne sont plus tabous.
Les orientations que vous nous fixez, et que nous approuvons, témoignent de votre ambition pour un Département responsable, acteur social et aménageur du territoire et de votre résolution à engager les évolutions indispensables pour préparer demain.
Maurice SOLIGNAC
Vice-président du Conseil Général délégué aux finances